Dans son récent rapport « Préserver nos aidants: une priorité nationale », Madame Dominique Gillot* propose, parmi 34 autres recommandations,de « garantir un droit opposable au télétravail pour les proches aidants dans le cadre de la reconnaissance de leur statut »
C'est dire que cette modalité de travail a bien été perçue par l'auteure du rapport comme une mesure qui permettrait aux salariés aidants d'un proche de mieux concilier leurs deux engagements : l'un sur le plan professionnel, l'autre auprès de leur proche fragilisé par la maladie ou le handicap.
Ce double rôle de salarié/aidant est souvent difficile à équilibrer (Lire notre article « Les salariés-aidants, producteurs de richesses et de solidarité »).
Le télétravail, lorsqu'il est possible, peut permettre à ces salariés de mieux concilier vie professionnelle et vie personnelle, sans obliger à recourir au temps partiel, à puiser sur les congés, ou même à renoncer à leur travail.
Qu'est ce que le télétravail ?
L'article L1222-9 du Code du Travail définit le télétravail comme «toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication (...)»
L'ordonnance du 22 septembre 2017, dans le cadre de la réforme du Code du Travail, a apporté des modifications visant à faciliter le recours au télétravail. Il n'est plus nécessaire de l'inscrire au contrat de travail. Il peut faire l'objet d'un accord collectif d'entreprise qui définira aussi les postes éligibles.
Dans cet accord collectif, sont en outre précisées les modalités selon lesquelles s'exerce le télétravail:horaires auxquels l'entreprise peut joindre le salarié, alternance entre présence en entreprise et télétravail, «droit à la déconnexion» etc...
Le télétravail ne peut pas être imposé aux salariés. Il n'est pas pour autant un droit pour le salarié. L'employeur peut le refuser. Il doit cependant, et c'est aussi une innovation de la loi «Travail», motiver son refus.
La proposition de Madame Gillot permettrait au salarié-aidant de ne pas se voir refuser la possibilité du télétravail, dès lors que celui-ci est inscrit dans l'accord collectif et que le poste du salarié y est éligible.
Les points forts et les inconvénients du télétravail pour le salarié-aidant
Si pour les salariés en général le télétravail peut permettre une meilleure articulation entre vie personnelle et vie professionnelle, les avantages sont encore plus sensibles pour les aidants d'un proche.
On peut énumérer :
- la baisse du stress lié aux horaires
- moins d'anxiété puisque l'on ne laisse pas le proche pour partir travailler
- la possibilité d'accompagner la personne aidée pour ses examens médicaux
- les économies de temps et de budget pour se rendre au travail
- élimination, au moins partielle, de la crainte d'être appelé(e) au travail pour une urgence liée au proche aidé etc...
Il faut toutefois penser aussi au « revers de la médaille » :
- passer plus de temps auprès du proche aidé peut diminuer les contacts sociaux
- le fait de gérer son temps de façon autonome peut conduire à dédier plus de temps à la personne aidée... et à devoir travailler sur du temps normalement dédié au repos ou au sommeil
- le télétravailleur-aidant peut alors avoir moins de limites dans l'aide qu'il apporte et se retrouver de nouveau dans une forme de stress...
En tout état de cause, il appartient à chacun, en fonction de la situation, d'évaluer les avantages et les inconvénients du choix du télétravail motivé par les besoins d'un proche en perte d'autonomie.
Le télétravail en phase de déploiement
Le télétravail en France semble plus lent à se développer que dans d'autres pays d'Europe du Nord notamment.
Peut-être les salariés-aidants seront-ils des moteurs du déploiement de cette forme de travail, compte tenu de leur nombre : rappelons que plus de 4 millions de salariés accompagnent un proche malade, âgé ou handicapé, adulte ou enfant.
Pour approfondir :
Teletravailler.fr - Préserver nos aidants : une priorité nationale – D. Gillot
* Dominique Gillot est présidente du Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées (CNCPH)