Notre pays porte un regard de plus en plus informé et conscient sur ses 11 millions d'aidants qui accompagnent un proche âgé, malade ou handicapé. Parmi eux on estime qu'au moins 300 000 seraient de jeunes aidants.
Une récente enquête Novartis-Ipsos a mis en lumière cette « face cachée et invisible des aidants » et apporte un éclairage inédit sur leur condition particulière.
L'étude a porté sur un échantillon de 501 jeunes aidants dont 43 % sont en situation actuelle d'aidants (les autres n'étant plus dans cette situation au moment de l'étude).
Qu'est ce qu'un jeune aidant ?
Il s'agit d'un enfant, d'un adolescent, ou d'un jeune de moins de 25 ans, qui vient en aide à un parent, grands-parent, ou membre de la fratrie. La nécessité de l'aide est due principalement à une maladie grave, au grand-âge, à un handicap. Cette aide est apportée en plus des temps scolaires, universitaires ou de travail. Elle est au minimum d'une heure par jour, avec une tendance à augmenter le week-end, mais peut aussi aller pour certains jeunes à plus de 4 ou 5 heures journalières. L'aide apportée concerne le soutien moral, la gestion de la maison, les déplacements, les aspects médicaux et dans une moindre mesure, les questions administratives et l'hygiène.
Comment devient-on jeune aidant ?
Il s'agit rarement d'un choix, mais bien plutôt d'une évidence comme le disent les jeunes aidants interrogés. La proximité avec la personne aidée et le fait qu'il n'y a personne d'autre pour aider, sont deux facteurs qui amènent le jeune à endosser ce rôle, en moyenne autour de l'âge de 16 ans (mais cela peut être aussi beaucoup plus tôt). Les jeunes aidants interrogés sont 33 % à aider seuls.La très grande majorité aide depuis au moins deux ans. Enfin on observe que sur l'échantillon des jeunes en situation actuelle d'aidants, il y a autant de jeunes femmes que de jeunes hommes.
Des conséquences ambivalentes
Dans la moitié des cas, le jeune aidant ne parle à personne du rôle qu'il joue auprès de son proche malade ou handicapé, considérant que cela ne regarde que lui.
Lorsque quelqu'un d'autre est mis au courant de la situation, c'est le plus souvent par hasard, car le jeune aidant n'a pas le « réflexe » de demander de l'aide.
Ces jeunes gens supportent donc une forme d'isolement et une responsabilisation précoce, dont les effets sont ambivalents : d'un côté ils disent ressentir de la fierté, un sentiment d'utilité, la conscience d'acquérir une maturité que n'ont pas les jeunes de leur âge...mais de l'autre ils ressentent aussi souvent de la fatigue physique, du stress, le sentiment d'être seuls ou dépassés, de l'inquiétude pour l'avenir...
Si les liens familiaux sont vécus de façon plus intense du fait de la solidarité mise en œuvre dans la relation d'aide, certains renoncements peuvent toutefois donner au jeune aidant le sentiment de ne pas vivre sa jeunesse, de s'isoler des autres, ou de manquer de temps pour lui-même.
En outre, il n'est pas rare que l'implication auprès du proche occasionne des retards ou des absences à l'école, à l'université ou au travail : 1/3 des jeunes aidants connaissent ce type de problème.
La France en retard dans le soutien aux jeunes aidants
Si dans leur ensemble les jeunes aidants de l'étude Novartis-Ipsos semblent montrer une assez bonne gestion de leur rôle, il existe toutefois une proportion de l'ordre de 2 jeunes aidants sur 10 qui supporteraient une charge importante ou très importante. Certains pays développent des actions spécifiques (Royaume Uni, Suède, Belgique, Canada...). En France, les initiatives sont encore rares, ou très localisées.On peut citer l'action de l'association JADE qui propose des ateliers et séjours-répit autour du cinéma. Cette association dispose d'un site internet et d'une page Facebook. On ne peut que souhaiter que le plan ambitieux dédié aux aidants, annoncé dans le cadre de la récente Journée Nationale des Aidants par la Ministre des Solidarités et de la Santé, Madame Buzyn, réserve une attention particulière à la condition de ces jeunes aidants.