La recherche de solutions
S'il est vrai que les réponses institutionnelles en terme de moyens pour aider à domicile les personnes dépendantes sont insuffisantes, cela n'empêche pas au niveau individuel les recherches de solutions pour améliorer sa vie d'aidant.e., dès lors qu'on le décide.
Les personnes participant au groupe d'échange entre aidants ont ainsi, chacune selon son cas, adopté des solutions jusqu'alors inexplorées ou rejetées :
- Jean-Pierre accepte de confier sa mère à l'accueil de jour : il maintient la promesse qu'il lui a faite de ne pas aller en Ehpad, tout en préservant sa propre vie et sa santé.
Il a également accepté par la suite que le transport aller-retour de celle-ci soit effectué par l'établissement.
Libéré des contraintes qu'il avait jusqu'ici, il peut retrouver sa place de mari auprès de son épouse, et renouer avec sa mère le lien mère/fils qui avait disparu au profit du rôle d'aidant.
- Line a fait entrer sa fille dans une Maison d'Accueil Spécialisée, qui se trouve assez loin de chez elle. Elle va la voir tous les week-ends et a convenu avec l'établissement des retours réguliers de sa fille à la maison pour les vacances.
Cela a été une décision très difficile au début. Mais la vie de Line s'est réorganisée, et Chloé, sa fille s'est bien adaptée à la vie en établissement où elle a même maintenant ses amis.
Line s'est aussi intégrée au sein de l'association de parents et prend ainsi, même à distance, une part active à la vie de l'établissement. Elle trouve aussi du soutien auprès des autres parents.
- Madeleine n'accepte plus les exigences de son mari, à savoir qu'elle seule doit assumer ses soins. L'infirmière vient désormais tous les jours.
Alors que Madeleine considérait au début que l'infirmière ne «faisait pas aussi bien qu'elle», elle a par la suite trouvé auprès de celle-ci un soutien et une «complicité» pour faire accepter la nouvelle situation au mari.
- Vincent a accepté d'exprimer ses limites à son épouse, ainsi qu'à l'entourage. Alors qu'il craignait de perdre à leurs yeux son image d'homme fort, il a reçu au contraire beaucoup de compréhension et de soutien. L'aide à son épouse s'organise différemment. Il a pu retrouver auprès d'elle sa place de mari, en laissant les professionnels de l'aide et du soin intervenir beaucoup plus largement au domicile.
Accepter qu'il n'y a pas de solutions parfaites
S'il est bien légitime de vouloir le meilleur pour son proche malade ou handicapé, on voit au travers de ces exemples que cette volonté poussée à l'extrême peut mener à l'épuisement de celle ou de celui qui aide.
Faire «sauter le verrou» du sentiment de culpabilité permet de rechercher des solutions, qui même imparfaites, sont toujours préférables au risque que court l'aidant de perdre sa santé, tant physique que mentale.
Vincent, Jean-Pierre, Madeleine ou Line... tous, après plusieurs mois de mise en œuvre des solutions qui ont émergé lors du groupe d'échanges entre aidants(*), disent avoir retrouvé du plaisir dans leur vie quotidienne.
Aucun ne voudrait «revenir en arrière». Ces aidants ont aussi appris à réadapter les solutions lorsque la situation évolue, afin de ne pas se laisser submerger de nouveau.
Ils font tous également observer que leurs proches aidés, malgré l'effort d'adaptation qu'ils ont également dû faire, vivent bien la nouvelle situation. Certains proches aidés ont même retrouvé leur capacité à nouer des relations extérieures depuis que l'aidant.e est moins «omniprésent».
L'épouse de Vincent, par exemple, fait partie maintenant d'une association de malades, et lie au sein de celle-ci de nouvelles amitiés.
(*) Groupe d'échanges entre aidants : série de cinq ateliers réunissant une dizaine de proches aidants, espacés de 10 à 15 jours. Animés par des professionnels de santé spécialisés dans l'accompagnement des aidants, ces ateliers abordent les difficultés rencontrées par les participants, en s'appuyant sur un programme pédagogique et sur la dynamique de groupe.
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ARTICLE N° 39 AVRIL 2020 LA MAISON DES AIDANTS/ANPERE