La recherche du pourquoi
Lorsque dans le cadre du groupe d'échanges entre aidants(*), ces participants tentent de répondre à la question du «pourquoi en suis-je arrivé.e là?», que la formatrice s'attache à susciter, les premières réponses fusent spontanément :
- c'est mon rôle de mère,
- c'est un devoir,
- qui d'autre sinon moi?,
- nous sommes mariés pour le meilleur et pour le pire,
- je lui ai promis qu'elle n'irait jamais en maison de retraite,
- je n'ai pas trouvé d'infirmière et de toute façon il n'accepte que moi,
- les aides à domicile ne font pas aussi bien que moi,
- ..
La liste serait trop longue à énumérer intégralement. Mais il est évident que les raisons invoquées par ces aidant.es sont parfaitement compréhensibles et ont une part de fondement réel.
Mais peut-être seulement une part...
Car si ces aidants/es, bien que convaincus/es que leur situation soit sans issue, viennent un jour pousser la porte d'un groupe d'échange entre aidants, c'est bien parce qu'ils pressentent que l'aide qu'ils/elles apportent va au-delà de ce qu'il est juste de faire au nom de l'affection que l'on porte à un proche.
L'intuition que quelque chose d'autre est à explorer?...
Le sentiment du décalage entre ce qu'ils disent et ce qu'ils/elles ressentent au plan le plus intime ?...
Quoiqu'il en soit, si un jour ils en viennent à se retrouver au sein d'un groupe, c'est bien pour tenter de sortir d'une situation qui n'est plus tenable, sinon au risque de perdre leur propre santé.
Commencent alors à émerger les raisons profondes du dépassement de leurs limites.
Moment souvent difficile, mais combien libérateur, que celui où l'on accepte de reconnaître que si l'on a laissé perdurer cette situation, c'est peut-être pour des raisons plus inconscientes. Ces raisons sont variables et propres à chacun, mais on peut en citer quelques unes. L'on pourrait par exemple :
- se sentir coupable d'être en bonne santé,
- perdre l'estime de soi si l'on assumait pas toute la charge de l'aide,
- redouter le jugement des autres,
- croire que l'on va perdre aux yeux d'autrui cette image d'homme ou de femme fort.e ou courageux.se à laquelle on tient,
- avoir peur de décevoir, ou de trahir,
- vouloir démontrer qu'on est à la hauteur,
- avoir du mal à se défaire d'une certaine «identité d'aidant.e» que l'on s'est construite, etc.
Ce n'est qu'au prix de ce travail de vérité que l'aidant.e peut enfin accepter que le fait de se poser des limites est légitime, et que cela n'entache en rien la loyauté ou l'affection vis à vis du proche aidé.
C'est alors seulement que l'aidant.e peut se décider à rechercher les solutions afin de remettre l'aide qu'il apporte dans des limites compatibles avec sa propre existence.
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ARTICLE N° 38 MARS 2020 LA MAISON DES AIDANTS/ANPERE