Un mandat de vente est conclu avec un agent immobilier. Ce mandat aboutit à la signature d’un compromis de vente, aux termes duquel l’acquéreur déclarait ne pas avoir recours à un emprunt pour financer son acquisition.
Arrivé au jour de la réitération de l’acte devant le notaire, l’acheteur est absent. Ce n’est que le lendemain que ce dernier donne signe de vie, et s’engage à verser 17 000 euros aux vendeurs, ainsi que la commission de 10 000 euros à l’agent. Cet acheteur ne versera pourtant jamais les sommes promises. Les vendeurs décident alors d’assigner l’acquéreur et l’agent immobilier en indemnisation du préjudice subi du fait de la non-réalisation de la vente.
La Cour d’appel rejette toute responsabilité de l’agent. Il ne pouvait pas être reproché à l’agent le manque de sérieux de l’acquéreur, et l’éventuelle insolvabilité de ce dernier.
D’abord, les vendeurs savaient que l’acheteur, âgé de 25 ans, célibataire et cariste magasinier, n’aurait pas recours à un emprunt pour acquérir le bien ; ils étaient libres de refuser de vendre. Ensuite, pour sécuriser l’opération, ils étaient en droit de réclamer de sa part des garanties supplémentaires. Enfin, l’agent immobilier ne dispose pas de pouvoir particulier lui permettant de savoir si un acquéreur aura ou non les fonds pour conclure la vente.
Les vendeurs décident d’aller devant la Cour de cassation pour contester ce raisonnement. La question qui se posait ici était donc celle de l’étendue du devoir de conseil de l’agent immobilier et de son obligation de mise en garde. L’agent a ainsi déjà pu être condamné pour n’avoir pas vérifié l’existence de la provision d’un chèque remis à titre d’acompte, et l’absence de mise en garde de son client mandant sur l’aspect alarmant de prorogations constantes du délai de réalisation de la condition suspensive d’obtention d’un prêt (CA Rouen, 1re ch., 13 juin 2001, n° 99/04632).
C’est dans la continuité de cette jurisprudence protectrice du vendeur que la cour de cassation vient s’inscrire, et invalide l’arrêt d’appel. L’agent immobilier, en tant que professionnel de l’immobilier, aurait du conseiller aux vendeurs de prendre des garanties suffisantes, et les mettre d'avantage en garde contre le risque d’insolvabilité de l’acquéreur qu’il leur avait présenté.
Source : Civ.1ère, 11 décembre 2019, n° 18-24.381