Dans un récent arrêt, la Cour de cassation a jugé que les primes issues d'un rachat total d’une assurance vie et reversées sur un nouveau contrat ne peuvent pas être considérées comme étant « manifestement exagérées » et n'ont donc pas à être intégrées à la succession.


Dès lors qu’elles proviennent d’un contrat d’assurance vie racheté, les primes versées ne peuvent pas être considérées comme étant « manifestement exagérées ». Tel est le jugement prononcé par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt daté du 9 février 2022.

Pour comprendre l’affaire examinée par la Cour, il faut savoir que l’assurance vie est considérée comme étant « hors succession ». Cela signifie que les capitaux versés au(x) bénéficiaire(x) désigné(s), de son vivant, par le souscripteur décédé n’entrent pas dans l’actif successoral de ce dernier. À ce titre, non seulement les sommes n’ont pas à respecter l’ordre de succession (le conjoint, puis les enfants ou à défaut les petits-enfants, puis les parents, les frères et sœurs…), mais elles ne sont pas assujetties aux droits de succession (*).


Un garde-fou

Pour éviter notamment que l’assurance vie ne soit utilisée par un parent pour déshériter ses enfants, le Code des assurances prévoit, toutefois, un garde-fou : si les primes versées sur le contrat ont « un caractère manifestement exagéré eu égard à l'âge du souscripteur, à sa situation patrimoniale et familiale et à l'utilité que revêtait pour lui l'opération », elles doivent être intégrées au patrimoine du défunt et donc soumises aux règles successorales.

C’est sur ce caractère « manifestement exagéré » que la Cour de cassation devait, en l’espèce, statuer. L’affaire concerne un homme qui avait ouvert un contrat d’assurance vie. Au décès de sa femme, il se remarie. Il effectue un rachat total de son assurance vie et reverse les sommes rachetées dans un nouveau contrat. L’homme désigne sa seconde épouse comme l’unique bénéficiaire de sa nouvelle assurance vie.


Bénéfice à comptabiliser

À son décès, sa fille, née de son premier mariage, conteste le bénéfice de sa belle-mère au motif que les primes versées sur le second contrat d’assurance vie étaient manifestement exagérées et devaient donc être comptabilisées dans l’actif successoral de son père décédé. Dans un arrêt du 26 mai 2020, la cour d’appel de Versailles réfute l’argument, puisque les primes en question étaient issues de la première assurance vie.

La fille se pourvoit en cassation. La plus haute instance de la justice française confirme la décision des juges de fond. Le caractère manifestement exagéré « ne s'applique pas aux primes versées sur un contrat d'assurance sur la vie racheté par son souscripteur », rappelle la Cour de cassation. En conséquence, la Cour rejette le pourvoi et condamne la fille à verser 3.000 euros aux deux sœurs de sa belle-mère, qui est décédée entretemps, et qui sont les représentantes légales de la défunte.

(*) Hormis pour les capitaux issus des primes versées après les 70 ans du souscripteur au-delà de 30.500 euros.


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