Dans la première partie de cet article (A lire ici), nous abordions la notion de qualité dans l'accompagnement d'un proche. Nous avons évoqué l'auto-diagnostic simple que tout aidant peut réaliser, en listant les tâches qu'il accomplit, à l'aide de la liste proposée, puis en affectant à chaque tâche une note de 1 à 3, en fonction de la difficulté ressentie. Dans cette deuxième partie, nous allons approfondir cette notion d'auto-diagnostic.
Une charge ressentie qui peut varier du simple au triple
En se basant sur la liste des 27 tâches proposées en partie 1, et en supposant que l'aidant accomplit toutes les tâches listées, on peut imaginer deux schémas extrêmes et purement théoriques :
- le cas de l'aidant qui donne un coefficient 1 (charge légère ou facile) à chaque tâche,
- le cas de l'aidant qui donne un coefficient 3 (charge importante ou difficile) à chaque tâche.
Ainsi le premier obtiendra un score de 27, tandis que le second obtiendra un score de 81.
Mais il s'agit là de pure théorie, car la réalité est bien plus complexe.
En effet un aidant peut :
- n'accomplir que certaines tâches, selon les besoins de la personne aidée ou l'aide apportée par les professionnels au domicile,
- ressentir une contrainte forte pour certaines tâches a priori simples (par exemple faire les courses ou organiser les loisirs),
- ressentir une contrainte légère pour des tâches pourtant a priori plus contraignantes (aider aux déplacements, à la toilette ou à l'appareillage par exemple).
Il conviendrait donc de reprendre l'auto-diagnostic proposé en partie 1 et de d'attribuer une note de 0 pour toutes les tâches que l'aidant n'accomplit pas.
Mais cela ne suffit pas encore, car d'autres éléments peuvent intervenir pour alléger ou alourdir le ressenti de l'aidant, notamment :
- le fait d'aider plus d'une personne,
- le fait de cumuler emploi et rôle d'aidant,
- la reconnaissance manifestée ou non à l'aidant par l'aidé,
- l'impact financier que peuvent avoir les tâches accomplies par l'aidant (par exemple aller faire les courses, ou accompagner l'aidé avec sa propre voiture),
- la possibilité ou non qu'a l'aidant d'avoir des moments à soi,
- le soutien ou l'absence de soutien de la part du reste de la famille etc.
De plus des tâches qui peuvent paraître légères en début de parcours d'aidant, peuvent devenir lourdes au fil du temps.
On voit donc bien que tenter d'évaluer la qualité de vie de l'aidant est complexe car le poids ressenti pour les tâches accomplies est subjectif, il peut évoluer dans le temps et il est aussi fonction du contexte psycho-socio-affectif de l'aidant ainsi que de son propre état de santé.
Ainsi, parmi les témoignages d'aidants recueillis,
- Sylviane nous dit :
«Je ne trouvais pas difficile d'aider mes deux parents. Depuis la disparition de ma mère, je trouve très dur d'aider mon père seul. Certes j'ai un peu moins de travail qu'avec deux personnes à aider mais l'état dépressif de mon père me pèse beaucoup car je ne sais pas quoi faire pour alléger sa peine. Alors que j'allais quotidiennement avec plaisir chez eux pour me charger de tout ce qui était nécessaire, aujourd'hui j'éprouve une grande pénibilité à aller chez mon père, malgré toute l'affection que je lui porte.
De plus ma mère me témoignait sa reconnaissance, alors que mon père, de caractère plus réservé ne sait pas dire ne serait-ce que merci. Non pas que j'attende des remerciements, mais ce merci qui traduisait le plaisir de ma mère à pouvoir rester chez elle malgré la perte d'autonomie, est absent aujourd'hui... et malgré moi je ressens une certaine frustration qui augmente au fil des jours.»
- Gabriel nous livre ses réflexions :
«Au début de la maladie de ma femme (atteinte de sclérose en plaques - Ndr), j'étais encore en activité et j'aurais voulu pouvoir m'arrêter pour m'occuper d'elle. Aujourd'hui, après plusieurs années passées à la soigner, et alors que je suis à la retraite, je voudrais reprendre une activité professionnelle, non pas pour l'argent, mais pour avoir les contacts sociaux que je n'ai plus».
Ainsi on le voit à travers seulement ces deux exemples :
- aider une seule personne peut être ressenti comme plus difficile que d'en aider deux,
- cumuler activité professionnelle et rôle d'aidant peut être ressenti comme bénéfique...
mais cela pourra être exactement le contraire pour d'autres aidants.
Une évaluation subjective de la qualité de vie de l'aidant
Comme nous le disions en introduction de la première partie de cet article, autant il existe une abondance de grilles d'évaluation de qualité pour l'entreprise ou les établissements, autant il est complexe d'évaluer la qualité globale de l'accompagnement d'un proche.
Difficile ne veut cependant pas dire impossible ! Il faut simplement admettre qu'il ne peut y avoir un outil universel, mais des outils sur lesquels l'aidant.e peut s'appuyer pour évaluer sa situation personnelle.
L'auto-diagnostic proposé en partie 1 reste valable pour une première «mise à plat» des tâches effectuées. En le parcourant et en affectant une note de :
- 0 si l'on n'a pas à effectuer la tâche,
- 1 si la tâche est facile ou assez facile,
- 2 si la tâche est parfois pesante ou pénible,
- 3 si la tâche est difficile, pesante ou contraignante,
chaque aidant peut objectiver d'une part l'ensemble des tâches qu'il accomplit et pointer celles qui lui sont le plus difficiles à accomplir, quelle qu'en soit la raison.
Cela peut permettre un premier questionnement sur les tâches notées par 2 ou 3 qu'il serait possible d'alléger :
- en les délégant (à des services extérieurs ou à des professionnels au domicile par exemple),
- en les partageant (avec d'autres membres de la famille par exemple),
- en les assouplissant (moins d'exigence sur le ménage par exemple),
- en supprimant celles qui ne sont pas indispensables.
La démarche de Geneviève que nous rapportions dans l'article «Aidants – Sortir du labyrinthe – Partie 1 et Partie 2 », montre qu'il est toujours possible d'améliorer sa qualité de vie, même en partant d'une situation complexe et d'une charge lourde.
L'amélioration de la qualité de vie de l'aidant est le premier versant de l'amélioration de la qualité globale de l'accompagnement. Le deuxième versant concerne la qualité de vie de l'aidé, et enfin le troisième versant se rapporte à la qualité de la relation qu'aidant.e et aidé.e entretiennent.
Ces deux derniers points feront l'objet de nos prochains articles.
Lire aussi :
La charge ressentie par l'aidant : Aider un proche peut engendrer un sentiment de charge, en fonction des répercussions que cela entraîne sur la qualité de vie de l'aidant...
ARTICLES N° 99 et 100: La Maison des Aidants® Association Nationale / ANPERE